▲ Composition-대한민국 여인, 259.1×193.9㎝ Mixed Media on Canvas, 1996

Vers 1994, Moon Ja Sohn(서양화가 손문자) développait une peinture d’inscription librement fauviste, ses 《nus》 (désignes par des mois de l’année: avril, mai ou décembre) semblant en particulier sortir en droite ligne des ateliers qui en 1905, avaient incendié le Salon d’Autonne.

On pense à Matisse, par Derain ou, du même Derain et de la même année 1906, à 《La femme en chemise》. Moon Ja Sohn emploie alors des couleurs fraîches et pures, dessine vivement directement à l’aide du pinceau et ressuscite avec un plaisir visible d’anciennes audaces qui, grâce à elle, retrouvent une nouvelle jeunesse après presque un siècle.

Trois ans plus tard, en 1997, tout semble avoir changé: les couleurs sont certes toujours aussi pures, mais le pinceau ne dessine plus à gros traits dans une pâte fluide. L’artiste a adopté au contraire une matière lourde, épisse et grumeleuse, faite de pigments mélangés à du sable.

▲ Composition-달맞이 하는 마음, 194×130㎝, 1995

Les visages stylisés qui en émergent commandent l’organisation complexe d’aplats colorés s’emboîtant les uns dans les autres. Le fauvisme n’est plus ici la référence adéquate, mais plutôt le dernier Maisse, celui des années quarantes et cinquantes. En l’occurrence, un Matisse qui n’aurait pas travaillé les papiers découpés, mais qui aurait recherché l’association des formes les plus simples avec la matière la riche.

Moon Ja Sohn(손문자 작가) ne renie nullement le peintre fauve qu’elle admire (auquel elle ajoute volontiers, pour sa science de l’imbrication des plans colorés, Serge Poliakoff), mais elle se montre capable d’être pleinement elle même sans se laisser écraser par ces références.

De la leçon de Matisse, elle a retenu que la couleur est de l’espace, mais aussi de la lumière qui est l’énergie de l’espace. Couleur et lumière, dont la double présence est souvent matérialisée par la séparation du motif en dus parties, dont l’une est comme plongée dans une ombre légère, produisant ainsi un effet plastique qui dépasse toute anecdote.

▲ 1994년 파리 그랑쇼미에르에서 작업한 것을 정리한 전시. 장피압장 모네 갤러리에서 여류화가 손문자(왼쪽)

Moon Ja Sohn(ARTIST SOHN MOON JA) est parvenue de la sorte, en quelques années, à épurer assez son propos pour que, visiblement, le sujet cesse d’avoir de l’importance en seul profit de la peinture. 《Ce qui est important, disait Matisse, c’est la relation de l’objet à l’artiste, à sa personnalité, et la puissance qu’il détient d’organiser ses sensations et ses émotions.》

Nous ne savons rien des personnages énigmatiques de Moon Ja Sohn, et cela importe peu, puisque ce que nous éprouvons avec plaisir, c’est la présence de la personnalité d’une artiste parvenue à un moment heureux de son évolution: le moment où elle en mesure d’organiser ses sensations et ses émotions.

Les petits formats récents de Moon Ja Sohn s’offrent effectivement au spectateur comme des condensations de sensations de l’artiste. Autrement dit, l’exact programe que Matisse fixait à sa propre peinture comme à celle des temps à venir.

△Jean-Luc Chalumeau/쟝 뤽 샤리모(프랑스 미술평론가)